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Pas de débat à l’Assemblée sur la séparation

Alors que les agriculteurs de la FNSEA et des JA manifestaient devant l'Assemblée nationale, les députés ont voté, lundi 26 mai, une motion de rejet de la loi dite Duplomb.

Lundi 26 mai, les députés ont adopté une motion de rejet, renvoyant la proposition de loi Duplomb en commission mixte paritaire, sans débat à l’Assemblée nationale. Analyse des implications et réactions sur le devenir de l’article 1, proposant d’assouplir la séparation conseil et vente pour les produits phytosanitaires.

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274 voix pour, 121 contre et 7 abstentions : la motion de rejet déposée par le rapporteur du texte Julien Dive, député LR de l’Aisne, a été largement adoptée, lundi 26 mai, pendant que des agriculteurs manifestaient devant l’Assemblée nationale. La proposition de loi « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur », portée par les sénateurs Laurent Duplomb et Franck Menonville, ira donc directement en commission mixte paritaire (CMP), sans débat public, procédure exceptionnelle. Sept sénateurs et sept députés décideront du sort du texte, en partant de la version actée fin janvier au Sénat, et non de celle issue des discussions en commission des affaires économiques.

Pour la séparation conseil et vente, le texte prévoit que, désormais, seules les firmes productrices de produits phytosanitaires soient concernées, sauf si ces produits sont de biocontrôle, à faible risque ou utilisables en agriculture biologique. La notion de conseil spécifique est supprimée, et les distributeurs pourront refaire du conseil à l’utilisation de produits phytosanitaires, sous réserve qu’il soit « formalisé par écrit », que « la prestation [soit] effectuée à titre onéreux », et qu’il s’inscrive « dans un objectif de réduction de l’usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques ».

La facturation distincte sur la table

Les travaux en commission des affaires économiques ne sont pour autant pas jetés aux oubliettes. « Je me porte garant de la défense, lors de la commission mixte paritaire, des amendements issus de notre travail en commission », a déclaré Julien Dive le 26 mai dans l’hémicycle. Deux amendements en particulier concernant la séparation y avaient été adoptés. Stéphane Travert (EPR), avait proposé de remplacer « La prestation [de conseil] est effectuée à titre onéreux » par « Le conseil donne lieu à une facturation distincte ». Une évolution approuvée par les membres de la commission.

Avec Jean-Luc Fugit, l’ancien ministre de l’Agriculture a aussi fait passer l’ajout de la disposition suivante : « Le conseil stratégique est obligatoire pour s’assurer que les conseils prodigués sont objectifs, et que les produits vendus sont utilisés de manière appropriée et responsable. » Des amendements qui devraient donc être remis sur la table lors de la commission mixte paritaire, qui devrait se tenir en juin.

Approbation de la Coopération agricole et de la FNSEA

« Face à l’avalanche d’amendements et d’articles additionnels, le débat en séance publique était de toute façon dans l’impasse. La motion de rejet préalable portée par le rapporteur était la seule option responsable pour sauvegarder notre souveraineté alimentaire », a réagi Dominique Chargé, président de La Coopération agricole, dans un communiqué. Tout en reconnaissant que « ce texte […] méritait pourtant un débat de fond ». Il attend « désormais que la commission mixte paritaire se réunisse au plus vite », pour finaliser le texte.

Concernant précisément la séparation, « plus le dispositif est simple à respecter, plus cela nous convient », confie à Agrodistribution Antoine Hacard, président de La Coopération agricole Métiers du grain. Quant à une facturation différenciée, « s'il faut l'accepter, pourquoi pas, mais encore une fois il faut faire simple ».

De leurs côtés, la FNSEA et les JA « saluent ce vote des députés, tout en regrettant l’incapacité de l’hémicycle à mener des débats apaisés et constructifs ».

Gronde à la Confédération paysanne et chez les ONG

A contrario, la Confédération paysanne dénonce « un passage en force », pour une « proposition de loi [qui] ne répond en rien aux difficultés et inquiétudes exprimées par les paysan·nes ». Même son de cloche à la Fnab (agriculteurs bio), qui « attend de la commission mixte paritaire, prévue en juin, qu’elle rééquilibre le texte et prenne en compte l’ensemble des agricultures ».

À la FNH (Fondation pour la nature et l’homme), outre la confiscation du débat public, on s’inquiète de la configuration de la CMP, « de facto défavorable aux oppositions et [qui] revient à affaiblir le poids de l’Assemblée nationale alors même qu’elle constitue l’organe central de notre démocratie ».

Générations futures évoque des députés qui, en votant la motion de rejet, « ont enterré la démocratie », l’utilisation à de telles fins de l’outil étant inédite. Rendez-vous en juin en CMP.

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